Egypte ancienneEgypte ancienne

Le livre des morts: traduction

Le livre des morts    Le livre des morts    Le livre des morts

Menu


Chapitre XVIII

Description

J'ai réuni ici deux planches qui constituent un tout divisé en deux planches distinctes. Une première << planche >> est occupée par quatre vignettes couplées, sur deux registres, inférieur et supérieur, le ou les personnages des registres supérieurs étant identiques à ceux des registres inférieurs. Il s'agit du couple Thouthou et Ani, toujours vêtus de leurs robes plissées blanches, en position de prière, Thouthou tenant toujours les mêmes attributs ; noter néanmoins que, alors que dans les autres représentations ils étaient tous deux nu-pieds, Ani porte ici des sandales maintenues sur le cou-de-pied par une lanière blanche.
Un texte les sépare de deux personnages revêtus chacun d'une peau de léopard au-dessus du pagne blanc court. Tous deux portent une perruque verte et ont, sur le côté droit de la perruque la mèche noire de l'enfance propre à Harpocrate. De la main gauche ils tiennent une peau de patte de panthère, tandis que l'autre bras, à l'horizontale, semble désigner les textes auxquels ils font face. Ce sont des prêtres qui, en réalité, introduisent le défunt par les portes qui suivent le texte vers les groupes de dieux juges dans diverses cités de l'Égypte. Leurs noms de fonction sont donnés dans les textes qui les accompagnent: Inmoutef (ou Iounmoutef) en haut et Sameref en bas. Ces deux prêtres représentent le fils du défunt à qui il revient de diriger le culte funéraire de son père.
Sur le faîte de la porte supérieure peinte en bleu-vert foncé, alternent trois plumes symboles de Maât et trois cobras dressés couronnés par le disque solaire, la déesse Ouadjet. Sur la porte du registre inférieur, peinte en vert, est couché un chacal (ou lévrier) noir, aux oreilles pointues, figuration d'Anubis. Au-dessus de sa croupe, l'oeil-oudjat, symbole d'Osiris.
Dans la longue planche les colonnes de texte (quatre colonnes dont la dernière est parfois seulement remplie aux deux tiers ou à la moitié) alternent avec une large colonne divisée en quatre ou cinq registres superposés, chacun d'entre eux contenant une divinité assise. Ce sont les juges divins des grandes villes saintes de l'Égypte.

En allant de gauche à droite et de haut en bas (ce qui est aussi le sens de lecture des hiéroglyphes linéaires inscrits dans les petites colonnes):
1. Héliopolis : Atoum, en robe verte, coiffé de la haute couronne du sud ; Shou, en robe blanche, couronne de plumes ; Tefnout à tête de lionne couronnée du disque solaire, en robe jaune ; Osiris, robe blanche et couronne-atef ; Thot à tête d'ibis, en robe verte.
2. Busiris : Osiris ; Isis en robe verte, coiffée du siège ; Nephthys, en robe blanche, coiffée du < château » ; Horus à tête de faucon, en robe jaune.
3. Létopolis : Osiris ; Horus dont la tête de faucon est coiffée de la couronne blanche (ici jaune) du sud ; un oudjat dessiné au-dessus d'un pylône ; un deuxième oudjat sur un pylône ; Thot à tête d'ibis, en robe blanche.
4. Bouto (Per et Dep) : Horus (sans couronne) ; Isis en robe blanche ; Amset en robe verte ; Hapy en robe blanche, à tête de chien.
5. Idebouy-Rekhty (ville non identifiée au nord du delta) : Osiris, Isis, Anubis, Amset, Thot. Néanmoins, comme on peut le lire dans le texte y affairant, ne sont nommés, comme dieux du tribunal de Rekhty qu'Isis, Horus et Amset.
Ici commence la seconde planche:
6. Abydos : Osiris ; Isis en robe jaune ; Oupouawet en robe blanche; un djed.
7. (Pas de ville citée) : Thot, à tête d'ibis, coiffé d'un croissant de lune dans lequel s'inscrit un disque ; Osiris ; Anubis ; Isdès.
8. Busiris : trois dieux non nommés.
9. Naref (la lecture littérale des hiéroglyphes du papyrus d'Ani est : n3yrrdf, qui doit être corrigée en Naref, nom de la nécropole voisine d'Héracléopolis) : Rê-Harakhti, à tête de faucon couronnée d'une disque solaire ; Osiris en robe jaune ; Shou ; Bebi (ou Baba).

Texte

Litanies de Thot

Paroles du prêtre Inmoutef. Il dit : je viens à vous, divine assemblée, puissante dans le ciel, sur la terre et dans Neter-khert. Je vous amène l'Osiris Ani, (qui est) sans reproche à l'égard de tous les dieux. Faites qu'il puisse être avec vous chaque jour.
Adoration d'Osiris, Seigneur de Rosetaou et de l'assemblée des grands dieux dans Neter-khert. L' Osiris Ani, le scribe, dit: Premier de l'Amenti, Ounnefer dans Abydos. Je viens vers toi e cour plein de Maât. Nulle faute n'est en moi, je n'ai pas menti en connaissance de cause, je n'ai pas agi avec duplicité. Donne-moi les pains, que je sois conduit en présence' de l'autel des maîtres de Vérité, (que) j'entre et que je sorte de Neter-khert, que mon âme-ba ne soit pas éloignée de la vue du disque solaire, de la vue de la lune pour toujours, pour toujours.
Paroles du prêtre Sameref. Il dit : je viens à vous, divine assemblée dans Rosetaou, je vous amène l'Osiris Ani. Donnez-lui pain, eau, souffle, un établissement dans les champs des offrandes comme aux Serviteurs d'Horus.
Adoration d'Osiris, Seigneur de l'Éternité et de l'assemblée des dieux, maître de Rosetaou. Le scribe, l'Osiris Ani dit: je te salue, roi du Neter-khert, prince d'Igert ! Je viens vers toi, je connais tes desseins, je suis pourvu de tes formes dans la Douat. Donne-moi une place dans Neter-khert, auprès des maîtres dé vérité, que mon établissement soit durable dans les champs des offrandes, que je reçoive des pains devant toi.
Dans le papyrus dAni, il manque ici une introduction au début de ce qu'il est convenu d'appeler les << litanies de Thot >> . Nous en donnons la traduction à partir d'autres
papyri, afin de rendre la suite plus compréhensible.

Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris (sous-entendu Ani) de ses ennemis, comme tu as proclamé la victoire d'Osiris sur ses ennemis devant la divine Assemblée, avec et avec Osiris dans Héliopolis, le soir des biens, la nuit de la bataille et où furent faits prisonniers les rebelles, le jour qui (fut celui) de l'anéantissement des ennemis du Seigneur du monde.
Le Grand Tribunal divin à Héliopolis, c'est Atoum, c'est Shou, c'est Tefnout.
L'emprisonnement des rebelles, la destruction des démons de Seth, c'est (lorsque) une seconde fois ils recommencent leurs attaques.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux l'Osiris Ani, Ani contre ses ennemis devant le Grand Tribunal, dans Busiris, la nuit où l'on érige les deux djed dans Busiris.
Le Grand Tribunal à Busiris, c'est Osiris, c'est Isis, c'est Nephthys, c'est Horus, le vengeur de son père.
L'érection du djed dans Busiris ce sont les deux bras repliés d'Horus protecteur de Létopolis. Ils sont autour d'Osiris comme les bandelettes d'un suaire.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux l'Osiris Ani, triomphant de ses ennemis, devant la divine assemblée dans Létopolis, le soir de la nuit des biens dans Létopolis.
Le Grand Tribunal à Létopolis, c'est Horus Khenti-irty et Thot qui sont dans le divin tribunal de Naref.
Le soir des biens, la nuit de la fête de l'aube est celle de l' enterrement d'Osiris.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe Ani, de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin, dans Pe et Dep, cette nuit de l'érection des colonnes d'Horus [celle où] il fut fait l'héritier des biens de son père Osiris.
Le Grand Tribunal divin dans Pe et Dep, c'est Horus, c'est Isis, c'est Amset, c'est Hapy.
L'érection des piliers d'Horus, [c'est à cause] des paroles de Seth à ses partisans : dressons les colonnes devant lui.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe Ani, triomphant de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin dans Idebouy-Rekhty, cette nuit où Isis veilla en faisant ses lamentations pour son frère Osiris.
Le Grand Tribunal divin dans Idebouy-Rekhty, c'est Isis, c'est Horus, c'est Amset.

Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe Ani, triomphant en paix, de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin dans Abydos, cette nuit de la fête-haker, lors de la séparation des morts, du dénombrement des Esprits-Akhou, lors de la manifestation des danses rituelles à This.

Le Grand Tribunal divin à Abydos, c'est Osiris, c'est Isis, c'est Oupouawet.

Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe, le comptable des divines offrandes à tous les dieux, Ani, sur ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin (qui) siège parmi les morts cette nuit où est fait le jugement de ceux qui sont anéantis.
Le Grand Tribunal divin qui siège parmi les morts, c'est Thot, c'est Osiris, c'est Anubis, c'est Isdès.
Le jugement de ceux qui sont anéantis, c'est la confiscation des biens des âmes-baou des enfants de la rébellion.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe Ani, triomphant de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin dans [la fête] du retournement de la terre dans Busiris, la nuit de retourner la terre dans leur sang et de proclamer le triomphe d'Osiris sur ses ennemis.
Le Grand Tribunal divin dans [la fête] de retourner la terre dans Busiris, c'est la venue des partisans de Seth, quand ils furent transformés en animaux, et qu'ils furent tués en présence de ces dieux et, ayant été frappés, leur sang coula parmi eux. Cela a été accompli (en suite) du jugement de ceux qui sont dans Busiris.
Salut, Thot quia proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe Ani, de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin dans Naref, la nuit qui (est celle) où l'on tient secrètes les formes.
Le Grand Tribunal divin à Naref, c'est , c'est Osiris, c'est Shou c'est Bebi. La nuit où l'on tient secrètes les formes, c'est quand on ensevelit la cuisse, les talons et la jambe d'Osiris Unnefer.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris Ani, triomphant avant Osiris de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin dans Rosetaou, la nuit où Anubis est couché ses deux mains sur les reliques d' Osiris, et où fut proclamée la victoire d'Horus sur ses ennemis.
Le Grand Tribunal divin dans Rosetaou, c'est Horus, c'est Osiris, c'est Isis. Le coeur d'Osiris se réjouit, le coeur d'Horus est dans la joie, les Deux Sanctuaires sont dans la paix face à lui.
Salut, Thot qui a proclamé victorieux Osiris de ses ennemis, proclame victorieux Osiris, le scribe comptable des divines offrandes à tous les dieux, Ani, triomphant de ses ennemis, devant le Grand Tribunal divin des Dix, avec , avec Osiris, avec chaque dieu, chaque déesse devant le maître de l'Univers. Il a détruit ses ennemis, il a détruit tout ce qui est impur en lui.
Si cette incantation est dite étant purifié, on pourra sortir au jour après avoir rejoint (l'au-delà) et prendre la forme voulue selon son coeur. Si cette incantation est récitée ,pour soi à voix haute (celui qui la dit se recréera sur la terre. Il ressortira (indemne) de tout feu, il ne pourra lui arriver aucun mal, son effet durera des millions d'années.

Commentaire

Les paroles prononcées par les deux prêtres représentent tout ce que tout Égyptien souhaitait après sa mort : être tout le temps auprès des dieux, jouir de la vue du soleil et de la lune, et avoir un carré de terre à cultiver, ou mieux encore à faire cultiver par ses oushebti dans les champs d'Ialou, afin d'avoir de quoi nourrir son âme. Néanmoins, il ne faut pas oublier le caractère symbolique et spirituel dont s'était revêtue leur langue même, à l'origine pratique et utilitaire, et l'invention d'abstractions qui ont conduit à utiliser des termes concrets pour signifier des concepts. C'est de cette manière, comme je l'ai fait remarquer dans l'introduction à propos des cosmogonies héliopolitaine et memphite, que par la bouche ou la langue on désignait la parole, le verbe, et par les parties du corps du dieu, souvent assimilées à un nom de divinité, on entendait les aspects visibles et invisibles du monde créé. Dès lors, les pains réclamés par le défunt, la vue du disque solaire, l'établissement dans les champs des offrandes, doivent être compris d'une manière spirituelle, comme un chrétien pourra percevoir la symbolique de la Cène et de la consommation du pain et du vin, corps et sang du Christ.
Les litanies qui suivent, chacune étant introduite par la désignation de l'un des grands tribunaux de l'Égypte avec les dieux qui y président, se réfèrent dans l'ensemble au combat d'Horus et de ses partisans, contre Seth et ses confédérés. Mais ici, ce qui fut peut-être une lutte humaine dont le souvenir a été conservé et déformé jusqu'aux temps historiques revêt un caractère cosmique et métaphysique pour devenir le combat du bien contre le mal, de la justice contre la violence, de l'ordre contre le chaos, de l'esprit contre la matière.
Il n'en reste pas moins qu'on rencontre, dans les explications symboliques données après la désignation de chaque tribunal, des allusions ou des métaphores qui restent bien énigmatiques à nos yeux. Cependant, certaines allusions peuvent être éclaircies. Par exemple pour ce qui est de la nuit des biens : il s'agit sans aucun doute de la nuit (encore qu'il ne faille pas prendre le terme de nuit à la lettre) au cours de laquelle les biens d'Osiris, c'est-à-dire le royaume d'Égypte, ont été conférés par l'assemblée des dieux à Horus, héritier légitime de son divin père.
En revanche, l'érection des colonnes, à la suite d'une parole de Seth, se réfère à un rite mystérieux. Le texte lui-même est ambigu et on a pu penser que l'ordre de dresser des colonnes a été donné, non par Seth à ses partisans, mais par un dieu partisan d'Osiris, Thot peut-être, pour contenir les combattants de Seth.
Certaines fêtes, telles la fête-Aker, une fête des morts célébrée à Abydos, la fête du < retournement de la terre », antique fête de caractère agraire à Busiris, restent tout aussi peu documentées. Il semble qu'au cours de cette dernière fête, intégrée dans le mythe d'Osiris, devaient être mimés les combats des Serviteurs d'Horus contre les Sethiens. Ces derniers sont représentés sous formes d'animaux, et plus particulièrement d'hippopotames, comme on le voit dans les scènes figurées de la partie extérieure du temple d'Edfou: les Serviteurs d'Horus, et le dieu lui-même, armés de harpons et montés sur des barques à voiles, frappent les hippopotames marchant dans un fleuve, le Nil en l'occurrence.
La nuit où l'on tient secrète les formes, qui est celle où on ensevelit diverses parties du corps d'Osiris, fait allusion au rassemblement des membres déchirés du dieu et à sa momification par Anubis, secrètement, à l'insu de Seth. Cependant, ces rites possédaient un sens ésotérique et devaient être pratiqués lors des mystères du dieu.
Le dernier des Grands Tribunaux ne siège plus dans une ville qui appartient au mythe osirien, mais à Rosetaou, c'est-à-dire dans la nécropole ou, plutôt, dans le monde des morts où triomphe le dieu sacrifié. C'est la conclusion des guerres entre les partisans de Seth et ceux d'Osiris, le triomphe de ce dernier, l'accession à la royauté d'Horus, la réunion éternelle des Deux Terres (le nord et le sud de l'Égypte), raison pour laquelle tous les coeurs sont dans la joie. Mais on peut voir combien l'aspect guerrier et matériel n'est jamais qu'un paradigme faisant ressortir la réalité spirituelle, dans cette chute finale : << Il a détruit ses ennemis, il a détruit tout ce qui est impur (matière) en lui. >> On pourrait aussi bien dire : << Il est devenu pur esprit. >>
L'aspect magique de l'incantation, souligné par la rubrique finale, semble n'être qu'une addition des prêtres magiciens, pour rappeler aux fidèles l'importance de l'incantation, sa portée magique.

chapitre XXI

description

Elle est le pendant de la vignette précédente : c'est la suite de la procession funéraire. A partir de la gauche : un scribe revêtu du double pagne long, tenant dans sa main droite levée un calame, et dans l'autre un vase à anses ; deux hommes vêtus du pagne court, portant sur l'épaule chacun un joug aux extrémités recourbées en col de canard, auxquelles sont suspendus des coffres remplis de fioles à huiles, parfums, onguents, et des fleurs. Ils tiennent dans une main des gerbes de fleurs de lotus ; un groupe de dix pleureuses, les bras levés en signe de lamentation, vêtues comme Thouthou de robes transparentes bleues laissant la poitrine nue ; deux d'entre elles, à chaque extrémité du groupe, sont agenouillées, l'une tournée vers les porteurs de coffres, l'autre vers la suite de la procession ; devant elles deux sièges peints en blanc chargés d'offrandes de fruits, d'herbes et de fleurs et, devant, un serviteur au crâne rasé s'avance à larges
pas, portant un cuisseau de boeuf en offrande. Dans un registre au-dessus de ce dernier groupe, une vache et, face à elle, un veau, animaux destinés au sacrifice ou, selon d'autres interprétations, symboles de la vache céleste Nout et du soleil levant.
Le groupe situé à droite représente le rite final, avant la mise au tombeau : le prêtre lecteur (Kher-heb), vêtu de l'ample robe de lin blanc, tient un rouleau de papyrus sur lequel il récite le texte relatif au rite de " l'ouverture de la bouche " ; devant lui, les divers instruments et objets utilisés pour le rite : ciseau-meskhet (ou mekhty autrement appelé medjat) sorte de ni d'un manche en bois, un instrument seou, rabot à lame de fer mu qui semble être le ciseau-medjedfet, variété du précédant, les trois herminettes utilisées par les charpentiers, netjerty, noua et dounâ, le << doigt d'or >>, épousant la forme de deux doigts unis, le pesesh-kaf, couteau en silex à double lame rappelant une queue de poisson, deux vases deshret, en forme de cône tronqué (ils sont rituellement au nombre de quatre) et le coffret contenant les onguents de purification. Il manque les aiguières-nemset, à panse et goulot latéral ; devant, côte à côte, le prêtre-sein tenant des attributs, et le prêtre officiant qui tient à la main la baguette magique (our-hekaou = grand de magie) en forme de serpent dressé (ici on reconnaît une tête allongée de bélier ; sur certaines représentations, la tête de bélier est surmontée d'un cobra dressé), baguette empruntée par les Hébreux pour en faire la verge d' Aaron et qui apparaît dans les tours de magie exécutés par les prêtres égyptiens et Moïse devant Pharaon dans le livre biblique de l'Exode.
Devant ces trois prêtres, sur une épaisse natte de jonc et de papyrus : une accumulation d'offrandes, Thouthou en pleurs, agenouillée les bras vers le visage, devant la momie d' Ani, pourvue de la fausse barbe, coiffée du cône à parfum, prête pour subir le rituel de l'ouverture de la bouche. La momie est maintenue droite par un
prêtre portant le masque d'Anubis. Enfin, encore derrière, l'entrée monumentale de l'hypogée, surmonté d'un pyramidion.

texte

Hommage à toi, maître du rayonnement (ou de la lumière), à la tête du Grand Château, [qui dissipe] la nuit et les ténèbres. Je suis venu à toi, le Glorieux, je suis pur, mes deux mains sont derrière toi, tes parties avec ceux qui sont devant toi. Donne-moi ma bouche pour que je puisse m'exprimer par elle. Puissé-je suivre mon c°2ur au moment du feu et de la nuit.

Commentaire

Court chapitre obscur. Le Grand Château étant le nom du temple de Rê à Héliopolis, c'est bien au soleil que s'adresse le mort. « Mes deux mains   pouvant avoir le sens de panier (mais notre texte se lit dnik), ce qui ne rend pas le texte plus clair. Il semble qu'on doive le comprendre ainsi: le défunt « enlace » (mes mains sont derrière toi) le dieu auquel il s'unit pour s'identifier à lui ; la suite est une allusion à Osiris, ici identifié à Rê nocturne, dont le corps a été démembré puis reconstitué pour revenir siéger parmi ses ancêtres divins.
Quant à la dernière phrase, il semble que ce soit une allusion aux épreuves de l'âme dans l'au-delà dont font partie la traversée du feu et des ténèbres peuplées de démons.
La suite du texte constitue la rubrique finale du chapitre LXII, le texte même de ce chapitre ne se trouvant pas dans le papyrus d' Ani. Le chapitre lui-même donne la formule pour « sortir au jour et ouvrir (ou traverser) le Imehet » , qui désigne selon Budge, Vocabulary, une « partie de l'autre monde de Sokaris » .

Chapitre XXII

Description

Elle est le pendant de la vignette précédente : c'est la suite de la procession funéraire. A partir de la gauche : un scribe revêtu du double pagne long, tenant dans sa main droite levée un calame, et dans l'autre un vase à anses ; deux hommes vêtus du pagne court, portant sur l'épaule chacun un joug aux extrémités recourbées en col de canard, auxquelles sont suspendus des coffres remplis de fioles à huiles, parfums, onguents, et des fleurs. Ils tiennent dans une main des gerbes de fleurs de lotus ; un groupe de dix pleureuses, les bras levés en signe de lamentation, vêtues comme Thouthou de robes transparentes bleues laissant la poitrine nue ; deux d'entre elles, à chaque extrémité du groupe, sont agenouillées, l'une tournée vers les porteurs de coffres, l'autre vers la suite de la procession ; devant elles deux sièges peints en blanc chargés d'offrandes de fruits, d'herbes et de fleurs et, devant, un serviteur au crâne rasé s'avance à larges
pas, portant un cuisseau de boeuf en offrande. Dans un registre au-dessus de ce dernier groupe, une vache et, face à elle, un veau, animaux destinés au sacrifice ou, selon d'autres interprétations, symboles de la vache céleste Nout et du soleil levant.
Le groupe situé à droite représente le rite final, avant la mise au tombeau : le prêtre lecteur (Kher-heb), vêtu de l'ample robe de lin blanc, tient un rouleau de papyrus sur lequel il récite le texte relatif au rite de << l'ouverture de la bouche >> ; devant lui, les divers instruments et objets utilisés pour le rite : ciseau-meskhet (ou mekhty autrement appelé medjat) sorte de ni d'un manche en bois, un instrument seou, rabot à lame de fer mu qui semble être le ciseau-medjedfet, variété du précédant, les trois herminettes utilisées par les charpentiers, netjerty, noua et dounâ, le << doigt d'or >>, épousant la forme de deux doigts unis, le pesesh-kaf, couteau en silex à double lame rappelant une queue de poisson, deux vases deshret, en forme de cône tronqué (ils sont rituellement au nombre de quatre) et le coffret contenant les onguents de purification. Il manque les aiguières-nemset, à panse et goulot latéral ; devant, côte à côte, le prêtre-sein tenant des attributs, et le prêtre officiant qui tient à la main la baguette magique (our-hekaou = grand de magie) en forme de serpent dressé (ici on reconnaît une tête allongée de bélier ; sur certaines représentations, la tête de bélier est surmontée d'un cobra dressé), baguette empruntée par les Hébreux pour en faire la verge d' Aaron et qui apparaît dans les tours de magie exécutés par les prêtres égyptiens et Moïse devant Pharaon dans le livre biblique de l'Exode.
Devant ces trois prêtres, sur une épaisse natte de jonc et de papyrus : une accumulation d'offrandes, Thouthou en pleurs, agenouillée les bras vers le visage, devant la momie d' Ani, pourvue de la fausse barbe, coiffée du cône à parfum, prête pour subir le rituel de l'ouverture de la bouche. La momie est maintenue droite par un
prêtre portant le masque d'Anubis. Enfin, encore derrière, l'entrée monumentale de l'hypogée, surmonté d'un pyramidion.

Texte

Formule pour donner la parole  à l'Osiris Ani, scribe artisan de divines offrandes à tous les dieux, afin qu'il soit justifié dans le Neter-khert.
Qu'il dise : j'ai jailli de l' oeuf dans la terre cachée. Que me soit donnée ma bouche, que par elle je parle devant le Dieu Grand, seigneur de la Douat. Que ma main ne soit pas repoussée par quelqu'un de l'assemblée des dieux. Je (suis) Osiris, maître de Rosetaou, Osiris partagé, le scribe Ani justifié, avec celui qui est au haut des marches.
Je suis venu selon le souhait de mon coeur de la lagune de la double Flamme, je l'ai éteinte.

Commentaire

Ce court chapitre fait allusion à la création selon la théologie hermopolitaine, dans laquelle le dieu jaillit de l'oeuf primordial. L'expression t3 W peut aussi bien être traduite par << pays mystérieux >> . L'expression est censée désigner le pays des morts, à moins qu'elle ne revête un sens ésotérique lié à une cérémonie initiatique.
S nsrt, la lagune (ou le lac) de la Double Flamme, est le nom d'un lieu, comme le montre le déterminatif de nsrt. On peut se référer à d'autres textes qu'on traduit par l'île de l'Embrasement, désignation d'Hermopolis où apparut le premier soleil. On reste dans la théologie hermopolitaine, et le lac, ou la lagune, figurerait alors les eaux primordiales d'où a surgi l'oeuf mystique de la création. Selon certains auteurs (Barguet LM) ce serait aussi là une allusion au flamboiement de l'aurore qui s'éteint lorsque le dieu parvient au couchant.
Les lignes qui suivent se retrouvent dans le chapitre XXI de la version saïte (vulgate).

Chapitre XXIII

Livre des morts, papyrus d'Ani

Description

Ani (ou sa statue) se tient assis sur un coussin, enveloppé dans un suaire blanc, devant un coffre au-dessus duquel se trouvent le couteau à lame bifide (pesesh-kaf)  et l'instrument en forme de doloire appelé seb-our (dont le sens littéral est << grande étoile >>). Debout face à Ani se tient un Prêtre-Sem en longue robe couverte d'une peau de panthère. Il tend vers Ani la << baguette magique >> , Our-hekaou (grand en magie), l'un des instruments utilisés pour le rite de l'ouverture de la bouche (Oun-re).

Texte

Formule pour ouvrir la bouche du scribe, l'Osiris Ani.

Dire: que ma bouche soit ouverte par Ptah, dénoués les liens, qui sont sur ma bouche, par le dieu de ma ville. Viens donc, Thot pleinement pourvu de charmes (magiques), (que soient) dénoués les liens, les liens, de Seth, qui gardaient ma bouche. Atoum, repousse par ta voix ceux qui voudraient la retenir sans ses liens.
Que soit ouverte ma bouche, que ma bouche soit ouverte par Shou avec l'outil de fer céleste avec (lequel) il a ouvert la bouche des dieux. Je suis Sekhmet-Ouadjet, assise du côté occidental dans le grand ciel. Je suis Sahu, le grand (qui est) au milieu des âme baou* d'Héliopolis.
Pour ce qui est de tous les charmes et des paroles (magiques) dites contre moi, que leurs soient opposés les dieu et toute l' Ennéade.

Commentaire

Tous les textes accompagnant les vignettes de cette planche sont des incantations de caractère magique.
Dans le premier texte, consacré à l'ouverture de la bouche et au maintien de son ouverture, les liens (ou les bandelettes) qui tiennent la bouche close sont brisés par Thot, alors que c'est Seth qui la tenait fermée.
Les Égyptiens n'ont utilisé le fer comme métal courant que très tardivement, à basse époque. La raison première est que les sources de ce métal se trouvaient loin de l'Égypte. Néanmoins, à l'époque d'Ani, si le fer était connu, en particulier des Hittites qui ont sans doute inventé la métallurgie, il n'était guère utilisé. .Ami a vécu plusieurs siècles avant que ne débute ce qu'il est convenu d'appeler l'âge du fer. Néanmoins, quatre-vingts ans plus tard, on ensevelira dans la tombe de Toutankhamon un couteau à lame de fer, sans doute d'origine hittite. Par ailleurs, les égyptiens ont connu très tôt le fer météorique (bi3t) qui, du fait Je son origine, leur apparaissait comme un « métal » sacré.

Chapitre XXIV

Livre des morts, papyrus d'Ani

Description

Ani (ou sa statue) se tient assis sur un coussin, enveloppé dans un suaire blanc, devant un coffre au-dessus duquel se trouvent le couteau à lame bifide (pesesh-kaf)  et l'instrument en forme de doloire appelé seb-our (dont le sens littéral est << grande étoile >>). Debout face à Ani se tient un Prêtre-Sem en longue robe couverte d'une peau de panthère. Il tend vers Ani la << baguette magique > > , Our-hekaou (grand en magie), l'un des instruments utilisés pour le rite de l'ouverture de la bouche (Oun-re).

Texte

Formule pour porter des charmes à l'Osiris Ani.

Je suis Atoum-Khepri, venu à l'existence par lui-même sur la cuisse de sa mère, qui donne des chacals à ceux qui sont dans le Noun, des hyènes à ceux qui sont dans les assemblées divines.
Vois, je réunis les charmes partout où ils sont, de tout homme qui en possède, plus promu que les lévriers, plus rapide que la lumière.
Salut conducteur de la barque de ! Solide est le cordage dans le vent, tandis que tu navigues vers le lac de Feu dans le Neterkhert. Vois tu réunis ces charmes de chaque lieu où ils sont, de tout homme qui en possède, plus prompt que les lévriers, plus rapide que la lumière, prenant les formes de l'existence de la cuisse de la mère, créant les dieux silencieux, donnant mère et chaleur aux dieux.
Vois, il m'est donné ces charmes de partout, plus prompts que les lévriers, plus rapides que la lumière.
Autre dire: plus rapides qu'une ombre.

Commentaire

Sans doute est-il fait allusion à des rites, des images, des actes dont le sens nous échappe, comme ces chacals (ou loups ?) qui sont dans le Noun et les hyènes (ou chiens ?) qui sont parmi les dieux.
Atoum-Khepri venu à l'existence sur la cuisse de sa mère évoque l'enfant-dieu (Harpocrate) représenté assis sur les genoux de sa mère. Il est possible de chercher dans une mauvaise interprétation d'un tel texte par les Grecs l'origine du mythe du dieu sauveur Dionysos, né de la cuisse de Zeus, son père.

Chapitre XXVII

Livre des morts, papyrus d'Ani

Description

Ani; debout vêtu d'une ample robe blanche avec un large collier (dans toutes les scènes suivantes il porte le même vêtement) ; il tient son coeur dans sa main droite à la hauteur de sa poitrine, face à Anubis. Entre eux, un grand collier de perles en faïence ou en lapis lazuli, pourvu d'un fermoir en forme de haut de pylône. Il supporte( un pectoral doré sur lequel se profile le disque solaire de Harmakhis en forme de scarabée sur sa barque.

Texte

Formule pour donner son coeur à l'Osiris Ani dans Neterkhert.

Puisse mon coeur être à moi dans la maison des coeurs ! Mon coeur est à moi dans la maison des coeurs ! Puisse-t-il être à moi mon coeur, puisse-t-il reposer en moi, (sans quoi) je ne mangerai pas les pains d'Osiris sur le rivage oriental du lac-agui. Un bateau khoukhet descendant (le fleuve) sur lequel tu navigues, je ne descendrai pas dans ce bateau avec toi. Qu'il me soit possible de pouvoir parler avec ma bouche, marcher avec mes jambes, repousser mes ennemis avec mes bras et mes mains. Que soient ouvertes pour moi les portes des cieux. Geb, le premier des dieux, ouvre pour moi ses deux mâchoires, il ouvre mes yeux aveugles, il étend mes jambes (qui étaient) repliées, Anubis affermit mes genoux pour que je me lève, la déesse Sekhmet me fait me redresser, j'existe dans le ciel, (car) a été fait ce que j'ai commandé dans la demeure du ka de Ptah.
Je connais mon coeur, (j'ai retrouvé) mon pouvoir sur mon coeur, mon pouvoir sur mes bras, mon pouvoir sur mes jambes, le pouvoir de faire ce qui plaît à mon ka. Mon âme-ba ne sera pas prisonnière de mon corps aux portes de l' Amenti. J'y entrerai en paix, j'en sortirai en paix !

Commentaire

Le coeur, centre des sentiments, était de la plus grande importance pour les Égyptiens. Sur la vignette, Ani tient son coeur hors de sa poitrine, mais son désir est que son coeur continue de lui appartenir. Contrairement au foie, à l'estomac, aux poumons et aux intestins, qui étaient disposés dans les quatre vases canopes, le coeur était en général laissé dans la poitrine. Cependant, il pouvait être remplacé par un scarabée sur lequel était inscrite la formule de ce chapitre.
Ici, entre enjeu Geb, le dieu terre, pour, après l'ouverture de la bouche, rendre au mort toutes ses facultés physiques, avec l'aide d'Anubis et de Sekhmet.
La traduction de lac (ou bassin)-agui (3gy) est un pis-aller. Les hiéroglyphes peuvent être inversés et il faut peut-être lire « gay » (« bassin-gay », traduction adoptée par Barguet LM. Ce peut être le nom d'un lac ou d'un bassin précis. Il en va de même pour 1e bateau-khoukhet (khwkht), dont on sait qu'il doit s'agir d'une embarcation grâce au déterminatif.
La demeure du ka de Ptah (Het-Ptah-ka enfermé dans une cadre) est le nom du temple de Ptah à Memphis. L'expression a fini par désigner la ville même de Memphis. Elle se trouve à l'origine du nom que les Grecs ont donné à l'ensemble du pays Aégyptos (d'après la forme Hetkaptah).

Copyright © Copyright © Guy Rachet. Le livre des morts des anciens Egyptiens. Introduction, traduction inédite et commentaires. Edition du Rocher