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Le livre des morts d'Ani

1)Les dieux du Livre des Morts

Le dieu dominant du Livre des Morts est évidemment Osiris. Au cours des siècles, la personnalité d'Osiris s'est nourrie au point de former une divinité très complexe et cependant logique dans son développement, et particulièrement proche de la sensibilité de peuples qui vivent une religion de salut fondée par un homme-dieu ai a connu une < passion » parmi les autres hommes. C'est à Busiris qu'apparaît Osiris, où il succède au dieu-pasteur Andjty, dont il prend tous les attributs. Il est tentant de voir dans cette figure un personnage historique, le premier peut être qui, pendant l'obscure période prédynastique, aurait unifié les clans du delta, voire l'Égypte entière. La plus ancienne version de sa geste se trouve dans les Textes des Pyramides ; i1 est alors intégré à l'Ennéade héliopolitaine en tant que fils de Geb et de Nout. Il y est e frère aîné d'Isis, de Seth et de Nephthys. II apparaît dans ces textes que c'est aidé par Thot que Seth, afin sans doute d'usurper le trône, fait périr Osiris, qui a succédé à son père Geb. Isis et Nephthys recherchent son cadavre avec force lamentations et, lorsqu'elles l'ont retrouvé, les dieux lui rendent la vie. D'autres traits de la légende sont mentionnés à des époques ultérieures, tels l'embaumement par Anubis(inpou), relaté dans un des Textes des Sarcophages. Il n'en demeure pas moins que bien des éléments de la légende qu'on ne trouve pas dans les Textes des Pyramides doivent être contemporains ou même plus anciens que ces derniers. Ainsi, il semble que de nombreux épisodes, qu'on ne trouve que dans le mythe rapporté par Plutarque, dans son traité sur Isis et Osiris, doivent remonter à une très haute époque. Dans ce texte, Geb et Nout ont leurs quatre enfants, auxquels est ajouté Haroëris 'Horus l'Aîné) ; ces cinq enfants naissent successivement pendant les cinq jours épagomènes. Osiris succède à leur père Geb, et il règne avec sa soeur et épouse Isis. Roi divin et philanthrope, il enseigne aux hommes l'agriculture et les pratiques de la religion. Jaloux de ce règne bienfaisant, Seth et soixante-douze conjurés )offrent à Osiris un festin et, par jeu, Seth présente un coffre dans lequel chacun des convives va s'installer pour voir s'il peut y rester à l'aise. Quand vient le tour du naïf, les conjurés ferment le couvercle et jettent le coffre dans le Nil. Isis part alors en quête de ce cercueil que les flots ont apporté jusqu'aux rivages phéniciens de Byblos. Un érica a entre-temps poussé sur le coffre contenant le corps d'Osiris, l'enfermant dans son tronc. Le roi de Byblos fait tailler ce bel arbre en un pilier et Isis, qui parvient à Byblos, se fait donner la colonne et le cercueil, qu'elle ramène dans les marais de Chemnis, près de Bouto. Elle ouvre alors le coffre et se fait féconder par Osiris, bien que défunt. Seth, ayant appris l'aventure, profite d'une absence d'Isis pour s'emparer du coffre et dépecer le corps d'Osiris en quatorze morceaux qu'il disperse à travers l'Égypte. Isis se met alors en quête des morceaux, qu'elle ensevelit sur place à mesure qu'elle les retrouve, et là furent élevés des sanctuaires osiriens. Cela explique que plusieurs cités d'Égypte se vantèrent de posséder la tombe du dieu. Osiris resta finalement dans le royaume des morts, dont il devint le souverain. Selon une autre version, Thot, Anubis, Isis et Nephthys réunirent les morceaux et en firent un corps rendu immortel par la momification. Les Égyptiens avaient aussi localisé le lieu où aurait été noyé Osiris : son nom était Nédit et il était situé sur le bord du fleuve, près d'Abydos. Dans l'Osireion d'Abydos était conservée la tête d'Osiris : l'importance de cette partie de la dépouille du dieu justifie les pèlerinages en ce lieu saint. Quant à la nature de la tête du dieu, et son origine réelle, on en est réduit à des hypothèses. Il paraît cependant probable qu'il ne s'agissait pas d'une tête humaine momifiée, mais plutôt d'un symbole. La tête aurait été conservée dans une corbeille ou une cruche en terre cuite, et soit ces contenants auraient été identifiés au contenu, soit ils auraient renfermé un simulacre de tête, peut-être en papyrus. Voici donc la légende constituée. Osiris est un roi mort et divinisé ; la conception de l'essence divine de la royauté est aussi vieille que l'institution elle même, mais ici est intervenu un facteur capital : ce roi se distingua par sa bonté, et sa mort violente, qui forme contraste, a été le point de départ de sa légende et de sa fortune. Le dieu est donné comme le roi de l'Égypte entière, bien qu'il ne porte que la couronne blanche du Sud (ce qui semble paradoxal, mais peut-être est-ce pour souligner que ce roi du Nord était aussi le maître du Sud). Il est toujours représenté comme le roi mort qui devient Osiris, tandis que son successeur est l'incarnation d'Horus, fils d'Osiris. Les fêtes d'Osiris célébrées à la fin de l'inondation ne prennent que secondairement un caractère agraire ; ce sont avant tout la célébration de la résurrection du roi défunt dans son fils. Cette fête, « drame de la royauté », renouvelle l'histoire mythique d'Osiris et d'Horus. Les autres caractères religieux du culte d'Osiris se greffent sur cette légende. Osiris est en relation avec l'eau du Nil, à laquelle son corps donne la force fécondante ; par ailleurs, lorsque Seth le déchiquette, seul son membre viril ne peut être retrouvé car, tombé dans le Nil, il est avalé par l'oxyrhynque, poisson qui, dans le nome de l'Oxyrhynque, est assimilé à Seth. Dieu fécondant, Osiris est aussi un dieu de la végétation : comme elle, il meurt lors de l'inondation, pour renaître au printemps, après un séjour sous la terre, comme le grain semé. Cet aspect était marqué par les Égyptiens qui, lors des fêtes d'Osiris, qui avaient lieu avant les semailles, façonnaient en limon un corps du dieu, où ils mettaient des grains qui levaient, couvrant la statuette de végétation. On a retrouvé dans des tombes un certain nombre de ces Osiris végétant. Par ailleurs, la spéculation héliopolitaine en a fait un dieu cosmique. Cette conception s'explique si l'on admet que, dès l'époque prédynastique, le roi défunt était assimilé à Osiris et qu'il a fallu faire entrer cette conception dans le cadre du dogme de la destinée solaire du roi ; ce dernier rejoint Rê dans le ciel en tant qu'Osiris qui, par le même coup, revêt le caractère céleste du roi mort. A la fin de l'Ancien Empire, Osiris fut aussi assimilé au Dieu Grand (dieu céleste d'origine préhistorique), comme l'avait été Horus avant lui. Cette conception est liée, en outre, à celle d'Osiris, dieu des morts. Le roi mort continue de régner dans le monde inférieur, qui est une image du monde terrestre, comme Osiris mort règne dans ce monde souterrain. Par ailleurs, le soleil éclairant le monde des vivants, tandis que la lune illumine le monde des morts, Osiris fut identifié à la lune (Aah). C'est sans doute cette conception du roi continuant de vivre et de régner sur l'au-delà qui a finalement fait d'Osiris un dieu des morts ; à ce titre, il a assimilé les divinités funéraires des nécropoles égyptiennes et plus particulièrement Khentamentiou, « le maître (celui qui préside) des Occidentaux » , à Abydos. C'est seulement sous la VI dynastie qu'Osiris paraît à Abydos : on commence déjà à y venir en pèlerinage. Cependant, sous Téti, premier roi de la Ve dynastie, une charte d'immunité protège les biens du dieu Khentamentiou, qui n'est pas encore totalement assimilé au nouveau maître du lieu. Ce n'est qu'au début de la XIe dynastie qu'Antef, s'étant rendu maître d'Abydos, en fera la cité d'Osiris, où auront lieu les célèbres mystères du dieu;celui-ci a alors, complètement assimilé les caractères de l'antique Khentamentiou. Un autre acteur de la plus haute importance dans le cycle osirien est Isis. Son nom égyptien Iset, signifie "le siège". Un hymne à Isis, inscrit sur les parois du grand pylône du temple de Philae, donne la mesure de la puissance universelle qu'on lui attribuait à la fin de l'époque des Ptolémées. Isis, vénérable Mère des dieux, donneuse de vie, maîtresse de Philae Dame de la Butte (la butte sainte d'Osiris), Reine de Senmout (nom égyptien de l'île de Bigeh) pleureuse qui connaît les formes secrètes de ton frère; Vénérable, puissante, souveraine des dieux, Toi dont le nom est exalté parmi ceux des déesses; Grande en magie aux desseins parfaits, dont les charmes refoulent Apophis, Toi sans l'accord de qui nul ne peut entrer dans le palais du seigneurs, glorieux de part ta volonté. Son nom est souveraine de la vie elle qui rend vie à l'Egypte(...) Puissante dans Thèbes, Grande dans Dendérah, Forte à Memphis, Mère divine dans Coptos, exaltée à Akhmim, maîtresse de tous les nomes, qui domine l'Ennéade par ses charmes magiques, Puissante, la force te confère ton prestige. Adorée dans le ciel, souveraine des étoiles, qui mets les étoiles sur leur orbite, Isis maîtresse de vie, dame de la butte sacrée, Souveraine et régente de Philae, Dame des pays du midi.