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Le papyrus d'Ani

Toutes les traductions proposées du Livre des Morts réunis l'ensemble des textes connus dans l'ordre donné par l' édition de Lepsius. Non seulement les doublons y sont nombreux, mais répétitions de formules sous des formes variées se révèlent vite lassantes. En fait, l'édition complète des formules constituant le Livre des Morts ne peut être utile que pour des chercheurs désireux d' étudier d'une manière détaillée les conceptions eschatologiques égyptiens à partir du Nouvel Empire. Un livre destiné à un large public m'a paru devoir se restreindre à l'essentiel et, surtout, proposer des commentaires qui rendent plus clairs, ou moins obscurs, des textes souvent singulièrement abscons. Mais il convenait d'éviter l'arbitraire. C'est la raison pour laquelle j'ai cru préférable de choisir un papyrus et d'en assumer une traduction pourvue de commentaires et d'une description préalable des vignettes, assortie le cas échéant de leur explication. En effet, les traductions donnent habituellement la suite des chapitres complètement détachés des vignettes dont ils sont souvent les commentaires, ce qui les rend encore plus abstraits et incompréhensibles. Sans doute nombre de ces formules devaient être récitées, mais en ne perdant jamais de vue leur destination illustrée par les vignettes. Détacher les formules de leur contexte et des vignettes qui les accompagnent, c'est proposer un livret d'opéra sans la musique !
Mon choix s'est porté sur le papyrus d'Ani pour plusieurs raisons. D'abord c'est l'un des plus anciens. Selon les estimations, on le date du début du règne d'Aménophis III (voire de ses deux prédécesseurs immédiats) ou, au plus tard, du début de la XIXe dynastie. Ainsi y trouvons-nous les chapitres les plus anciens, les plus proches des sources, et, a priori, les moins déformés. C'est aussi l'un des plus beaux papyrus pour ce qui concerne les vignettes : non seulement elles sont, pour la plupart, dessinées avec soin, mais elles illustrent parfaitement tout le rituel funéraire. Enfin ce papyrus a été soigneusement publié à plusieurs reprises, ce qui facilite sa lecture. Il provient d'une tombe inconnue et a été acheté à des marchands égyptiens par le British Museum en 1888, avec celui d'Anhaï, une chanteuse d'Amon.
Sur les vignettes du papyrus d'Ani sont à plusieurs reprise figurés Ani lui-même et son épouse Thouthou. Ani était un haut fonctionnaire, < scribe royal, comptable des offrandes divines à tous les dieux [c'est-à-dire responsable des offrandes faites aux temples], gouverneur des greniers d'Abydos, scribe des revenus des maîtres de Thèbes », comme il le déclare lui-même; par maîtres de Thèbes, il faut entendre les dieux : il assumait donc des fonctions sacerdotales. Sa femme était < dame de la Maison, gemat d'Amon » , ce qui signifie qu'elle était prêtresse dans le temple d'Amon-Rê à Thèbes (la Maison) et chanteuse dans le culte de ce dieu, raison pour laquelle elle est représentée tenant le sistre, instrument religieux par excellence utilisé par les femmes.
Comme c'est généralement le cas dans les papyrus les plus anciens, la succession des « chapitres » dans le papyrus d'Ani est très différente de celle de la vulgate. Elle suit le développement de vignettes qui ont été dessinées avant que ne soit tracé le texte e hiéroglyphes cursifs. 
Le papyrus d'Ani est constitué par un ensemble de feuilles de papyrus collées les unes aux autres, formant un rouleau d'une lon gueur de plus de 23,5 m sur une largeur d'environ 38 cm. Le fond est d'une teinte brune, sur lequel sont peintes des séries de vignette de tailles diverses ; certaines d'entre elles peuvent occuper toute 1 hauteur du papyrus, mais la plupart sont réparties en plus petit registres, souvent superposés de façon à occuper les unes la parti haute du papyrus et les autres la partie inférieure. Les textes hiéro glyphiques sont répartis en colonnes nettement séparées par de traits verticaux. Ils peuvent alterner avec les vignettes ou, plus soi vent, les encadrer. Le papyrus déroulé se lit de gauche à droite l'ensemble textes et vignettes qui les illustrent constituant de scènes qui se succèdent en séquences arbitraires. En effet, dès le premières scènes, nous assistons à la pesée de l'âme et à la présentation de notre héros, Ani, à Osiris, et ce n'est qu'après cette sort de fin heureuse, qu'on assiste à ce qui a précédé ce jugement, à savoir les funérailles et les rites qui leurs sont attachés. Puis vient 1 marche de l'âme du mort dans le monde infernal, le passage de portes des enfers, son affrontement avec les démons des ténèbres et les dieux de la Douat.

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